Par temps de "crise", de démantèlement des protections sociales et

d'augmentation des inégalités, la LOPPSI représente un nouvel épisode

de la guerre aux pauvres et aux formes de vie considérées comme

dangereuses par le gouvernement. Des couvre-feux pour les mineurs à

la censure de l'internet en passant par la répression des vendeurs de

rue et des regroupements de jeunes, des destructions des camps de Rroms à celle des

habitats alternatifs, la LOPPSI tape sur tout ce qui bouge (voir analyse

détaillée au dos). Elle mobilise à cet effet les « citoyens », offre de

nouveaux pouvoir aux vigiles, et prévoit l'installation de mouchards

dans les ordinateurs. Le pouvoir veut museler les contestations et

mouvements qui ressurgissent et se cherchent. Il traque les moyens de

débrouilles dans la précarité ou les espaces de rencontres des démunis.

Il recadre ceux qui tentent de vivre autrement et d'échapper à la contrainte

d'être rentable et exploitable à merci. Plus les lois passent, plus nous

intégrons le sentiment d'être surveillable en permanence,

et plus décider par soi-même de ce qui est acceptable ou non

et agir en conséquence devient proscrit.


Dans cette optique, la LOPPSI ne fait d'ailleurs que confirmer la

tendance. Les dispositifs que viennent renforcer cette loi sont déjà

largement appliqués et entrés dans la vie quotidienne, à grand renfort

de nouvelles technologies. A titre d'exemple local et sans attendre ces

nouvelles mesures, la Mairie de Dijon a, de son propre chef, installé un

parc de 26 caméras de video-surveillance en 2007. Cette même mairie

mène aussi depuis des années une politique assumée d'expulsions et de

destruction des habitats de fortune des Rroms, et d'autres bâtisses

occupées, sans toujours s'embarrasser de procédures. A Dijon encore,

grâce aux politiques préfectorales, des dizaines de lycéens vont passer

en procès en janvier pour être aller manifester dans la rue lors du mouvement

des retraites.


Malgré les nombreuses manifestations un peu partout en France, nous ne

nous faisons pas d'illusions sur le fait qu'un gouvernement "à

l'écoute" abroge ou modifie cette loi. La LOPPSI montre aussi crûment

qu’on ne peut espérer s’en sortir en construisant son alternative, sa

yourte, son squat ou son potager discrètement dans son coin. Pourtant

les mouvements sociaux et révoltes qui se font écho d'un pays à l'autre

depuis quelques mois, et les multiples insoumissions créatives

développées au quotidien, témoignent de la vivacité des résistances

toujours possibles.


Si nous voulons rejoindre à Dijon le mouvement anti-loppsi, ce n'est pas

pour se contenter de ralentir un peu le rouleau compresseur, mais bel et

bien pour ouvrir des perspectives d'émancipation. Il s'agit de tisser

des liens et des solidarités entre les personnes et groupes dont la

LOPPSI cible les modes de vie et les luttes, et d'oeuvrer aux formes

d'organisation nécessaires à empêcher son application. Il s'agit d'être

capable de continuer à braver l’interdit haut et fort, de vivre sans

être paramétrés et pistés, d'être méconnaissable face aux caméras, de

refuser les couvres-feux et d'occuper les rues, de diffuser des contenus

subversifs sur internet ou à la sauvette, de multiplier les rencontres

et habitats hors-normes...


++++ Que vise la Loppsi ? quelques aspects de la loi :


La LOPPSI 2 est la suite de la Loi d’Orientation et de Programmation de

la Sécurité Intérieure votée en 2002 qui définissait les orientations

nationales des politiques de sécurité


# Vidéo-surveillance : La loi prévoit de tripler le nombre de caméras

(60'000). On autorise des entreprises privées à mettre des

caméras qui filmeront la voie publique, on étend de toutes façons la

possibilité pour les autorités de placer des dispositifs de

vidéosurveillance partout (et notamment pour les manifestations). Les

municipalités seront fortement incitées et subventionnées pour installer leur

«vidéoprotection».


# Habitats précaires, alternatifs, nomades : L’article 32 ter A renvoie

entre autre aux attaques estivales du gouvernement contre les Rroms.

Il se lit plus généralement comme une offensive à l’encontre des habitants d’habitations

de fortune, de campements de sans-abris mais aussi à l’encontre de

personnes ayant choisi d’habiter caravanes, roulottes, camions, tipis,

yourtes, auto et éco-constructions. L'article vise à permettre de passer

outre les quelques possibilités de se défendre devant la justice et

d'obtenir des recours et délais pour protéger ce type de domicile.


L’article 32 ter A prévoit une possibilité d’expulsion dans un délai de

48h après simple mise en demeure du préfet sans décision de justice.

L'article prévoit une sanction financière pour

ceux qui ne s’exécuteraient pas assez vite, ainsi que la destruction de

l’habitation et des biens qu’elle renferme, sur procédure accélérée. Il

n’est prévu ni relogement ni hébergement pour les expulsés. Ils doivent

quitter les lieux et se rendre “invisibles”.


# Citoyen relais et privatisation de la sécurité : La LOPPSI prévoit de

mettre des citoyens au service de la police. Des missions de

surveillance du voisinage peuvent leur être confiées, mais aussi de

délation des troubles à la tranquillité publique, des jeunes qui font

l’école buissonnière ou qui occupent les halls. A ce propos un

amendement prévoit d’augmenter l’amende jusqu'à 1500 euros pour

l’occupation en réunion des espaces communs, des parkings souterrains,

des toits des immeubles, et permet de prendre des mesures correctives ou

éducatives à l’encontre des mineurs impliqués ou de leurs parents.

Quant aux majeurs, ils pourront être convoqués devant le tribunal de

police.

Le texte prévoit aussi de délivrer des pouvoirs de policier à

des agents de sécurité engagés par des boites privées comme par exemple

contrôler une identité ou procéder à une fouille.


# Mineurs : La criminalisation de la jeunesse est un des objectifs majeurs

du gouvernement depuis quelques années. La loppsi offre la possibilité

de comparution immédiate pour les mineurs délinquants,

l'instauration de couvre-feu pour les mineurs de moins

de 13 ans, des pressions financières sur les parents, du fichage et

des sanctions pour les jeunes jugés absentéistes.


# Peines Planchers : De la même façon l’amendement 390 étend les peines

planchers aux violences aggravées dès le premier acte de violence alors

qu’elles ne concernent aujourd’hui que les délits commis en récidive

légale.


# Cybercriminalité : La police pourrait utiliser tout moyen (physiquement

ou à distance) pour s’introduire dans des ordinateurs et en extraire des

données dans diverses affaires, allant de « crimes graves » à divers

délits comme «l’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour

irrégulier d’un étranger en France commis en bande organisée». La loi

prévoit aussi d'augmenter les moyens de censure des sites en s'en

prenant, pour amorcer le processus, au contenu "pédophiles".

On se souvient qu'avec ce même prétexte consensuel, le fichage adn

s'était étendu en quelques années à la quasi-totalité des autres formes de délits.

# Délit de vente à la sauvette : Elle n’était réprimée que par une amende

atteignant au maximum 750€. Avec la LOPPSI II il est prévu de faire de

cette pratique un délit, punissable de 6 mois de prison et de 3750€

d’amende !